Après une montée mémorable en 4X4, nous arrivons, sains et saufs, au Fort Libéria.

Ce Fort, voulu par Louis XIV pour protéger la nouvelle frontière entre la France et l’ Espagne (suite à son mariage avec la Reine d’ Espagne), fut construit sur un éperon rocheux qui domine la cité de Villefranche.

 Cette ville fondée en 1092 par le Comte Guillaume Raymond de Cerdagne occupe une place stratégique à la croisée du Conflent, de la Cerdagne et de la Catalogne. 

En 1679, Vauban fait accepter son projet de Fort, suite aux anciens projets datant de 1668 et considérés comme trop dispendieux.

Vauban propose une grosse redoute, revêtue à l’épreuve du canon, avec des casemates et une terrasse, des logements pour une centaine d’hommes, des citernes et des magasins, protégés par un profond fossé. La base est faite de gros moellons surmontés de briques percées de créneaux. Les chemins de ronde sont garnis de garde-fous en fer forgé (toujours intacts de nos jours).

De nouveaux aménagements sont alors décidés par Louvois : de nombreuses caves voûtées à l’abri des bombes dont une servant de magasin à poudre, ainsi qu’une galerie souterraine partant de la casemate, passant sous le fossé.

Les travaux durent 6 ans.

Une des geôles souterraines du château servira de prison pour l’ Affaire des Poisons : à la cour de Louis XIV, ont lieu de troubles affaires d’empoisonnements, de magie et de messes noires, de sacrifices rituels d’enfants. Des grands noms de la cour sont impliqués dont la Marquise de Montespan, favorite du Roi. Tous les protagonistes de l’ Affaire sont transportés dans différentes forteresses, les plus sûres du royaume.

 En 1717, après 36 ans de captivité, meurt la première femme de chambre de la Marquise de Brinvilliers. La seconde femme à tout faire et entremetteuse, y passera 43 ans.

Au cours des guerres avec l’ Espagne ( de 1688 à 1697, de 1701 à 1715 et de 1717 à 1719 ) le Roussillon ne sera pas inquiété.

Mais en 1793, le manque de garnisons et le mauvais état permettent aux Espagnol une occupation rapide d’une partie de la Province. Les canons de l’ ennemi dégradent une partie des parapets et guérites, qui seront rétablis le 13 germinal de l’An 2 de la République.

Des travaux considérables sont entrepris de 1850 à 1856 car Vauban avait fait l’erreur de construire son Fort trop en retrait par rapport à la ville. Ainsi l’ennemi pouvait passer entre les deux sans être vu ni d’en haut ni d’en bas.

Napoléon III, toujours obnubilé par le retour des Espagnols, fait construire trois ouvrages plaqués côté vallées. L’entrée est transférée au nord-est et protégée par une tour ronde. Il fait construire, en même temps, le souterrain dit «des 1000 marches» conduisant du château à la ville, employant 250 personnes. Le terrain accidenté et la roche friable provoquent 22 morts.

L’armée quitte Villefranche et le Fort en 1890. Durant la première guerre mondiale, le château sert de prison pour 12 officiers allemands. De 1940 à 1944, il sert de base de surveillance aérienne.

Le fort est finalement acheté par un industriel qui le baptise «Fort Libéria» en hommage à la ville qui s’appelait, à l’origine, «Villa Libéria» (Ville libre).